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Ligne 5 du tramway : à quoi joue l’agglo ?

L’enquête publique sur la ligne 5 du tramway vient de se terminer. Des centaines d’habitants de l’agglomération ont déposé des remarques et des contributions. La plupart du temps sérieuses et très informées, aux dires des commissaires-enquêteurs. C’est un véritable changement qui s’empare des politiques publiques, même dans leur version la plus technicienne. Les citoyens disposent aujourd’hui d’une expertise forte. Les puissances publiques doivent les entendre bien au-delà des procédures de consultations formelles.

J’ai déposé une série de trois contributions auprès des commissaires-enquêteurs, téléchargeable ici.

Deux d’entre elles concernent un financement en doublon. Autrement dit, l’agglomération envisage de financer, par les travaux du tramway, des infrastructures qui doivent soient être financées par d’autres autorités publiques, parce qu’elles ne concernent pas le transport en site propre, soit qui font l’objet d’une programmation d’ensemble par plusieurs collectivités et l’État.

En termes techniques, il s’agit d’une « insuffisante prise en compte des effets cumulés du projet avec d’autres projets connus ». Il ne s’agit pas d’une méconnaissance, la Communauté d’Agglomération est parfaitement au fait de ces autres projets. Il s’agit d’une carence de gouvernance, de l’anticipation d’une incapacité à gouverner ensemble, à mettre en commun les énergies. Et cela porte sur 50 millions d’€ !

Deux tronçons sont concernés, le viaduc Maurice Genevaux, sous lequel devrait passer la ligne 5, vers la cuisine centrale, et la Route de Mende. Le futur viaduc Maurice Genevaux servira à faire passer le Contournement Ouest de Montpellier, un projet qui doit être financé par l’État et Vinci Autoroutes dans le cadre du raccordement des autoroutes A75 et A9. Ce n’est pas une infrastructure de transport public. Ce n’est pas à l’agglomération de payer ! L’économie réalisable ici est au bas mot de 40 millions d’euros !

Le second tronçon concerné est celui du secteur Campus. Le tramway doit passer Route de Mende, entre les deux universités Montpellier 2 et Montpellier 3. La requalification de cet espace est inscrite au Contrat de Plan Etat-Région dans le cadre du financement accordé au Pôle Régional d’Enseignement Supérieur. Par ailleurs, la ville de Montpelier s’est engagée également à un financement de l’opération à hauteur de 50M€, pour aplanir l’espace et construire une continuité entre les deux universités. Un concours international d’architecture a désigné en 2010 plusieurs équipes d’architectes pour travailler sur le projet. Ces équipes ont produit des esquisses et des programmations, qui incluent toutes le tramway. Et l’agglomération ferait seule dans son coin une requalification au rabais, parce qu’il est trop difficile de s’inscrire dans cette programmation collective ? Le tracé doit s’insérer dans ce plan d’ensemble, il ne doit pas l’ignorer. S’insérer dans cette dynamique collective de projet, c’est économiser une partie des fonds nécessaires à l’implantation du tramway tout en permettant une réalisation globale plus performante. C’est ça, la bonne gestion des deniers publics. Tout le contraire de la gestion chacun dans son coin.

Le redéploiement de ces 50M€ sur le reste du tracé sera indispensable pour en améliorer les perspectives. Cette économie essentielle permettra d’envisager ce qui devient une urgence absolue : desservir les communes de l’agglomération par des tram-express là où les anciennes voies ferrées le permettent encore, des bus à haut niveau de service ailleurs, boucler le schéma de transport public montpelliérain par la mise en place d’un bus à haut niveau de service, au rythme de passage régulier, sur les boulevards intérieurs et les boulevards extérieurs.

Ils sont essentiels ! 50 M€, c’est ce que rapporte l’augmentation de la taxe d’habitation, décidée fin 2011, en pleine période de crise. Et c’est à ça qu’ils serviraient ? À financer des infrastructures qui sont déjà prévues au budget d’autres opérations ? C’est hors de question. Il est grand temps que nos collectivités locales se rendent compte que l’intérêt général commande qu’elles sachent collaborer entre elles. Les batailles d’égo nous ont fait perdre trop de temps et trop d’argent, et notre territoire ne peut pas le supporter plus longtemps.

50 millions

(à suivre)